Création 2018

« …La révolte ne va pas sans le sentiment d’avoir soi-même, en quelque façon, et quelque part, raison… »

TEXTE

ALBERT CAMUS

METTEUR EN SCENE

THIERRY FALVISANER

ACTEURS

ARNAUD ALDIGÉ

STEPHAN KALB

ALEXANDRE LE NOURS

JOHANNA NIZARD

CHRISTOPHE VANDEVELDE

STAFF

SCÉNOGRAPHIE : GRÉGOIRE FAUCHEUX

CRÉATION SONORE : SHOI LORILLARD

CRÉATION LUMIÈRE : SYLVAIN BLOCQUAUX

coNSTRUCTION : JÉRôME PEREZ

PRODUCTION : GeneviÈve de vroeg bussiere

ADMINISTRATION : SYLVIE MOINEAU

GRAPHISME : ESTELLE MAUGRAS

Synopsis

En février 1905 à Moscou, un groupe de terroristes, appartenant au parti socialiste révolutionnaire, organisait un attentat à la bombe contre le Grand Duc Serge, oncle du Tsar. Cet attentat et les circonstances particulières qui l’ont précédé et suivi font le sujet des Justes. Tuer et mourir pour une idée ! Quelles justifications à un acte de terreur ? Cet acte de terreur, Les Justes vont le commettre, les plongeant dans une contradiction tragique.

Pas moins qu’hier, nos destinées contemporaines sont entre les mains de quelques décideurs politiques et économiques et notre capacité individuelle et collective à résister et lutter est chaque jour interrogée. Et plus encore que notre capacité, se pose la question du comment résister et jusqu’où.
Dans Les Justes, la réponse ne nous est pas donnée, elle nous incombe. Les personnages que Camus nous propose et qui répondent à leurs contradictions jusqu’à l’extrême, nous dévoilent le spectre large de la nature humaine, déchirée par ses pulsions contradictoires. Mort et vie s’enchevêtrent ici sans pouvoir jamais se séparer, et même la pulsion amoureuse qui lie les deux figures de la pièce Dora et Kaliayev ne produira pas le miracle espéré. Il s’agit bien d’une tragédie où la révolte est plus forte que la raison ou l’ordre établi.
Renoncement, abandon, acceptation, cynisme nous guettent tous et chacun.
Tout semble nous échapper, l’indignation a remplacé la colère juste, légitime et agissante.
Pour Camus il est nécessaire « d’évoquer ces grandes ombres, leur juste révolte, leur fraternité difficile, les efforts démesurés qu’elles firent pour se mettre en accord avec le meurtre et pour dire ainsi où est notre fidélité ».
Alors nous aussi nous tacherons à notre mesure d’être fidèle aux questionnements, et à l’engagement de Camus en proposant une version électrique, tendue, incarnée des Justes et donner à cette représentation sa fonction éminemment politique de l’acte théâtral.

Albert Camus, notre contemporain
Albert Camus est un moderne. Sa lecture politique d’un monde en reconstruction est tout à fait singulière et lui a valu d’ailleurs un certain nombre d’inimitiés ou encore de remise en cause. Alors que nombre de ses contemporains s’enferrent dans une lecture binaire du monde en devenir, Camus ne s’exonére pas d’un juste questionnement qui va jusqu’à faire valser ses propres convictions, certitudes. Le doute semble être chez lui un moteur de la pensée et non un empêchement à agir.
Les Justes est un exemple de cette singularité, de cet à-propos, et de la modernité de la pensée de Camus. Alors que lui-même s’est engagé dans la résistance, alors que la France panse encore ses plaies du régime de Vichy, de la collaboration, de l’occupation nazie, Camus semble questionner la notion même de résistance. Il ne la remet pas en cause, il la questionne.

« Doit-on tuer à n’importe quel prix ? Peut-on enlever la vie même pour une cause juste ? Qu’est-ce qu’une cause ? Qu’est ce qui est légitime ? Et par là même, la question de la Terreur, du terrorisme. 
Que veut dire ce mot et qui l’emploie ? ».

Bachard El Assad emploie le mot terroriste pour qualifier ceux qui le défient.
Les Rohingyas sont exterminés et le prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi les qualifie de terroristes pendant qu’Erdogan prend leur défense.
Les nazis ont placardé des affiches pour présenter le groupe Manouchian comme terroristes…
Le mot en soi contient tout et son contraire. Il contient la peur et plus encore la destruction. Il résonne où le sens disparaît au profit de la bestialité. Il est l’endroit de la négation de l’homme et de la vie.